Nous sommes au milieu des bois, c’est le début du printemps. Mais ce cadre idyllique va être la scène d’un événement macabre : une petite fille gît morte au milieu d’une clairière. De son corps fuient de minuscules personnages qui voient leur environnement détruit par le processus de décomposition qui s’attaque à la fillette. Ce qui lui est arrivé exactement restera un mystère.

Cette communauté va devoir s’adapter à un nouveau milieu, bien plus sauvage que ce qu’ils ont connu jusqu’à présent. Ils seront confrontés aux animaux, à la faim, mais surtout à l’hiver qui arrive, et avec lui, des choix qui feront tomber les masques des convenances.

Jolies ténèbres m’aura laissé un grand sentiment de malaise face à cette petite communauté aux traits si angéliques pourtant capable des pires horreurs. Parmi eux, Aurore tente de maintenir un semblant d’unité. Mais le sentiment d’entre-aide des premiers instants va vite faire place à des luttes de pouvoir, à l’égoïsme, à la cruauté, à la traîtrise, … Chaque membre semblant représenter une des nombreuses facettes complexes de l’âme humaine.

Une lecture d’autant plus dérangeante que des scènes assez violentes se déroulent dans l’indifférence totale des autres personnages. Le vernis de cette communauté va rapidement s’écailler pour laisser entrevoir le vrai visage de ses membres : des êtres dénués des notions basiques de bien et de mal. Aurore elle-même devra faire un choix : sa survie ou celle de sa communauté.

Jolies ténèbres est un conte de fée complètement décadent soutenu par les illustrations magnifiques du couple Kerascoët. Depuis que j’ai découvert leur travail dans Miss Pas Touche, je m’intéresse de près à leur bibliographie. Une fois de plus, je ne suis pas déçue. D’autant plus que Vehlmann a su insuffler la dose de beauté et de sinistre nécessaire à cet album tout en nuances.

Vehlmann et Kerascoët, Jolies ténèbres, Dupuis, 2009.