Les yeux rouges de Myriam Leroy

La lecture de ce nouveau roman de Myriam Leroy a provoqué en moi un profond sentiment de mal-être. Quelque chose de viscérale qui est parti du fond de mes tripes, m’a prise au cœur et m’a serré la gorge tout au long du livre. C’est que l’histoire est profondément banale dans notre société axée sur les réseaux sociaux et sur cette impression d’impunité qu’on a derrière nos claviers.

Notre héroïne est journaliste dans un média national, c’est pour ça que Denis l’a contactée sur Facebook. Il trouve qu’elle sort du lot, il aimerait mieux la connaître et partager avec elle une correspondance en ligne. En tout bien tout honneur bien sûr, il est père de famille.

Elle est réticente, il utilise beaucoup trop d’emojis et gère une page Facebook où il a l’habitude de dézinguer tout ce qui bouge. Mais elle a peur de décevoir, elle veut faire plaisir, et prend donc la peine de lui répondre quelques ligne. Message après message, Denis ne la lâchera plus. Quand elle essayera de couper les ponts avec cet individu envahissant qui a même été jusqu’à roder devant son travail dans l’espoir de la croiser, la réaction sera brutale et notre journaliste va entrer dans une spirale de harcèlement qui va avoir des conséquences désastreuses sur sa vie.

Les yeux rouges, c’est le portrait touchant d‘une femme hantée par sa propre éducation. Il faut être gentille, toujours polie, ne surtout pas déranger, s’excuser aussi parce qu’on est peut-être responsable en tant que femme du regard que les autres nous portent. Mais on a envie de leur dire à tous ces gens que ça ne marche pas comme ça. Que ce n’est pas à la victime de s’excuser, que le harcèlement en ligne a des vraies conséquences psychologiques et physiques. A tous ceux qui ont osé lui dire que la bave du crapaud ne doit pas atteindre la blanche colombe, et qu’il suffisait de ne pas aller lire tout ce qui se dit sur Twitter, on a envie de leur répondre que c’est justement en minimisant les répercussions morales du harcèlement qu’on permet aux personnes comme Denis de s’acharner.

Myriam Leroy a choisi l’écriture rapportée comme moyen de retranscrire une histoire si proche de son expérience personnelle. Le tout se lit très facilement mais avec la rage au cœur, je vous le recommande.

Myriam Leroy, Les yeux rouges, Le Seuil, 2019.

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